Reportage | La Chooz d’une Thonne

Parce qu’un véhicule pareil ne devrait pas se cantonner aux Alpes uniquement.

Emmanuel van den Brûle
Drivetime.be
Published in
7 min readApr 1, 2019

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On l’attendait depuis un moment, et ce long laps de temps nous a fait hésiter sur l’itinéraire. Le retour de la sportive française devait se faire chez nos voisins du sud, mais où exactement ? Il s’est finalement décidé qu’un itinéraire près de nos frontières serait le mieux, pour couper la poire en deux.

Quelques ponts croisés, et le regard d’un passant un peu effrayant.

Et ce tracé démarre à Chooz, près des centrales nucléaires marquant la proximité de la Belgique. Autour de nous, la Meuse qui marque une boucle et profite de la fin de l’hiver pour déborder sur les champs avoisinants. Difficile de repérer où se trouve son lit habituel. Notre route à nous, elle, est facile à trouver, car elle emprunte la seule départementale qui touche le village au nom étrange.

Après quelques kilomètres vers le nord, le premier rond-point nous emmène vers le sud-ouest et révèle immédiatement les qualités dynamiques de l’Alpine A110. Avec un poids si léger, changer de direction relève du bonheur. Encore une poignée de bornes jusqu’à Vireux-Molhain, et il est temps pour nous de quitter les longues courbes pour nous diriger vers les hauteurs et leurs virages plus serrés.

Peu de feuilles sur les arbres en ce début de printemps, mais énormément sur le bord de la route.

Sur la D989, les arbres encore dépourvus de feuilles offrent une visibilité bienvenue pour voir si quelqu’un débarque en face, et lorsque ce n’est pas le cas (comme dans 99% du temps aujourd’hui), la petite puce bleue s’amuse sur toute la largeur de la route et se moque de toutes les aspérités du bitume. Nous voilà dans les premières épingles du jour, déjà empruntées auparavant, où la vue sur la Meuse (encore elle) ne nous empêche pas de garder le point de corde en ligne de mire. C’est fou comme un engin si léger peut avoir un effet si marqué sur nos sens.

Après cette portion sinueuse, nous n’enjambons pas la Meuse une fois, ni même deux, mais bien trois fois tout en profitant de ses courbes dans les vallées sauvages du Nord. Fumay, Orzy et Laifour offrent du potentiel à créer de nouveaux jeux de mots, mais la surprise du jour vient sans hésitation de Madagascar. Non, on n’invente rien, le hameau existe bien, juste avant de passer à Monthermé, point d’arrivée de notre premier rassemblement.

Madagascar, au nord de la France…

De là, la route se pimente petit à petit, et malgré le passage par Phade (encore un jeu de mots facile), les virages se resserrent tout en escaladant le col du Loup. À l’exception du motard surexcité dans nos rétroviseurs, la D131 n’a rien d’autre à nous offrir qu’un ruban de bitume sans ligne droite et sans nids de poule. Les virages de la descente sont plus roulants, mais pas moins amusants, tandis que nous nous rapprochons gentiment de la frontière belge, et avec elle les méandres de la Semois.

Une fois le poste de douane (inutilisé) passé, nous dérouillons nos membres (vraiment trop faciles ces jeux de mots) et nos roues dans les serpentins de la N914. La première partie en fond de vallée est bercée d’un rayon de soleil, tandis que la remontée à travers roche et épingles est agrémentée de sursauts du train arrière. Tout le monde s’amuse dans ce toboggan vers Petit Fays, où la chanson nous revient immédiatement en tête (“je t’aime beaucoup”).

Elle aime tous les types de virages, cette A110.

En route vers Gros Fays, le bitume se redresse petit à petit, mais nous retrouvons un ruisseau et de belles courbes dans la descente vers Mouzaive. Rochehaut nous secoue également, mais n’ébranle en rien l’équilibre du poids plume, ni notre sourire. Le fou rire devant le panneau de Sensenruth ne fait qu’en rajouter une couche, et les boucles en direction d’Herbeumont nous rappellent d’excellents souvenirs datant d’il y a un an.

À Moyen, les routes deviennent un peu moins bonnes, mais le rythme augmente un peu afin de rallier la frontière à nouveau. Une arrivée en France, mais pourquoi faire ? Il s’agit premièrement de rallier le pays d’origine de cette nouvelle Alpine, non seulement parce qu’elle arbore fièrement ses drapeaux tricolores sur la carrosserie et l’habitacle, mais aussi car le retour d’une véritable sportive française se doit d’être célébré sur leur sol. Alors, cette A110, que vaut-elle ?

Fin de tracé entre soleil et nuages, entre lignes droites et virages (ça rime).

Restant parfaitement fidèle à la philosophie de l’A110 originelle, le remake aurait facilement pu faire un pas de travers, mais ce n’est pas du tout le cas. Le design rappelle l’ancêtre, mais se montre assez actuel pour ne pas tomber dans le néo-rétro abusif. Surtout, ces traits cachent un poids contenu aux alentours de la tonne, ainsi qu’un équilibre qui rendrait jaloux le meilleur des trapézistes. Le grand gagnant là-dedans ? Le plaisir de conduite, qui grâce à cet allègement (n’entravant en rien l’isolation, soit dit en passant) offre un amortissement souple, rendant la caisse souple et joueuse. Le train avant s’appuie sur un léger freinage, tandis que l’arrière se dirige sur un filet de gaz, en travers ou non. Dans un monde où les sportives essaient de mêler embourgeoisement et temps au tour, l’Alpine se montre hautement plus adaptée à nos routes favorites, tout en pétaradant joyeusement entre chaque virage.

Passé la frontière, nous reprenons de l’altitude pour profiter du coucher de soleil, et arrivons à notre point final, le village de Thonne-le-Thil. Quelle balade haute en émotions et en paysages. Retour à la maison, sans manquer de faire une pause à l’abbaye d’Orval où les discussions tourneront sans surprise autour de la chose d’une tonne. Coup de coeur vous dites ?

Infos pratiques : 191km | +/- 3h30 de route.

Merci à Renault Belux pour le prêt de cette Alpine A110 Legend. Un vrai bol d’air frais qui montre que la France a toujours su y faire du côté des sportives. Merci également à Arthur Baudoux pour son aide précieuse lors de la réalisation de ce reportage.

Quelques images en bonus :

A110² : la filiation est frappante.
Pas énormément de rangement dans l’habitacle, mais rassurez-vous, la bouteille de rouge trouve toujours sa place.
C’est rare, mais trouver une voiture aussi jolie sale que propre, ça donne encore plus envie de rouler. Remarquez également les jantes édition “Legend”.
Équipe de choc pour une voiture également frappante.
Si vous vous demandiez d’où nous venait l’inspiration pour les jeux de mots pourris…
Faite pour avaler des bornes, sans aucun doute.
Des au revoir difficiles, pour se retrouver bientôt ? Espérons-le.

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